(Le Potentiel 11/01/2012)
Le jour éclaire, la nuit obscurcit. Entre le jour et la nuit, il en a toujours été ainsi et il en sera ainsi. De même, entre l’Eglise (catholique) et l’Etat congolais, les relations ont toujours évolué en dents de scie, la cohabitation tumultueuse, souvent dans un dialogue de sourds, les deux parties se regardent en chiens de faïence. Il en a toujours été ainsi depuis l’indépendance en 1960 ; il en est ainsi, et il en sera ainsi tant que leurs intérêts et leurs perceptions de la «vérité» ainsi que du bien-être du peuple divergeront. Décryptage.
L’on sait que l’Eglise a réussi le pouvoir exclusif de régler la vie religieuse ; l’Etat, celui d’organiser la société temporelle en vue du bien commun. Ouverts l’un à l’autre, dans la reconnaissance et le respect mutuels de leur valeur et de leur compétence, l’Eglise et l’Etat contribueront, chacun pour sa part, à l’éducation du bien total de l’homme. Mais en RDC, ce climat de dialogue mutuel n’a pas toujours été de plus serein tout de suite après l’indépendance.
Dans ce texte, nous n’allons plus revenir sur le feuilleton actuel qui défraye la chronique sur ce que la presse qualifie déjà de «bras de fer» entre l’Eglise catholique et l’Etat congolais. Notre effort consiste à raviver la mémoire collective afin que l’opinion sache que la crise actuelle – si elle en est une – entre l’Eglise du cardinal Laurent Monsengwo et le pouvoir de Joseph Kabila n’est pas la première du genre en 50 ans d’indépendance de ce pays aspirant à la démocratie.
Depuis 1960, tous les présidents de la République qui se sont succédé à la tête de l’Etat – Joseph Kasa-Vubu, Mobutu Sese Seko, Laurent-Désiré Kabila et Joseph Kabila – ont toujours rencontré une sorte de «résistance» de la part des prélats, notamment les trois cardinaux, à savoir Joseph-Albert Malula, Frédéric Etsou et Laurent Monsengwo. Qu’est-ce qui divise autant les acteurs politiques aux princes de l’Eglise ?
Je t’aime, moi non plus
Après la proclamation de l’indépendance du Congo-Belge en 1960, la mutinerie de l’armée entraîna le départ d’un très grand nombre de Blancs. Il faut ajouter à cela l’insuccès du gouvernement Lumumba qui sera imputé à des manœuvres de ces derniers. C’est ainsi que Mgr Malula, alors évêque auxiliaire de Kinshasa, eut le rôle délicat de défendre le «droit à la vérité» face à une information peu objective qui circulait au sein parmi le peuple. En effet, il protesta contre la haine et le matérialisme qui attaquaient le christianisme en l’accusant d’être quelque chose d’importé au Congo. En des termes non voilés, il s’exprimait ainsi : «La vérité n’est ni noire ni blanche». Tout était parti de là. Et depuis toujours, tous ses combats ainsi que ceux de ses deux successeurs tournent autour de ce concept très polémiqué, la «vérité».
Au lendemain de la mort de Lumumba, le 17 janvier 1961, les brutalités redoublèrent parce que beaucoup attribuèrent la responsabilité de sa mort aux missionnaires et au Vatican. Des missions furent saccagées, des prêtres et d’autres missionnaires furent malmenés ou même tués. Les relations évoluaient ainsi jusqu’au lendemain du coup d’Etat de Mobutu en 1965.
Le bras de fer revient avec la suppression et la confiscation des médias de l’Eglise de 1972 à 1973. Tout est parti de la critique acerbe faite par Marcien Towa de l’idéologie de l’authenticité lancée par le président Mobutu dans un célèbre éditorial de «L’Afrique chrétienne» publié en 1972. C’était une occasion en or pour le président Mobutu d’exercer une pression politique sur le cardinal Malula – qu’on accusait d’être l’auteur de l’éditorial incriminé – mais aussi, pour «créer des divisions au sein de l’épiscopat zaïrois, en isolant le Cardinal». Car pour le gouvernement, cet éditorial avait un caractère subversif et contre-révolutionnaire. Toute une campagne s’ensuivit, qui aboutit à l’expulsion du Cardinal de sa résidence, le 24 janvier et à son exil à Rome du 11 février au 28 juin 1972.
Le chaud et le froid
Tout se déroulera ainsi dans un climat de méfiance où chaque partie souffle le chaud et le froid, jusqu’au discours historique du Maréchal Mobutu, le 24 avril 1990, qui consacre le processus de démocratisation, ouvrant le pays au multipartisme. Mais lorsque Mobutu voulait se revêtir de son vieil habit, il a trouvé, encore une fois, l’Eglise sur son chemin. Cette fois, c’est un groupe de prêtres de l’archidiocèse de Kinshasa qui organise une marche, le 16 février 1992, pour obtenir la réouverture de la Conférence nationale souveraine. La répression de la machine du pouvoir fait beaucoup de morts.
Quand arrive Laurent-Désiré Kabila, le 17 mai 1997, il y eut, certes, de changement des personnes à la tête de l’appareil de l’Etat. Néanmoins, la chute de l’ancien régime n’a pas entraîné automatiquement le changement tant souhaité par le peuple. Sous Kabila père, on a compté plusieurs cas d’arrestations des journalistes, mais aussi d’excitation à la haine envers des soi-disant «ennemis du peuple». Même Mgr Cyprien Mbuka, évêque de Boma (Bas-Congo) fut arrêté. Il y a eu aussi la suspension de plusieurs organes de presse. Avec le régime en place, les méthodes sont loin d’avoir changé. Les mêmes causes produisant les mêmes effets. Jusqu’à ce jour.
In fine, nous avons essayé de (dé)montrer que l’Eglise et l’Etat se sont souvent boudés et il reste encore beaucoup à faire, de part et d’autre, pour «s’apprivoiser mutuellement», selon l’expression de Saint Exupéry, sans trop nous demander d’ailleurs qui est le renard et qui est le Petit Prince ! Car, l’Eglise et l’Etat doivent, en principe, marcher ensemble pour servir la même cause, celle du bonheur de la famille humaine. Si l’Etat doit prendre des lois justes et les appliquer en toute équité, l’Eglise, elle, doit veiller et répercuter la mission du Christ afin que la Bonne nouvelle soit une nouvelle bonne pour les peuples.
Des Congolais parmi les 32 912 clandestins expulsés de France en 2011
La France a expulsé 32 912 clandestins l’an dernier, une hausse de 17,5% par rapport à 2010, soit «le résultat le plus élevé jamais atteint», a annoncé le ministre de l’Intérieur Claude Guéant, qui s’est fixé pour objectif d’atteindre les 35 000 mesures d’éloignement cette année. Parmi eux, des ressortissants de la République démocratique du Congo.
«J’ai décidé d’élever l’objectif d’éloignements pour l’année 2012 à 35.000 reconduites», a-t-il annoncé. «Par comparaison, entre 1997 et 2002, le nombre de mesures d’éloignement réalisées chaque année atteignait péniblement 9.000» a-t-il affirmé.
Par ailleurs, 182 595 titres de séjour ont été accordés l’an dernier, selon des chiffres encore provisoires, contre 189.455 en 2010, soit un recul de 3,6%, a souligné le ministre. À cette occasion, Claude Guéant a répondu aux critiques de la présidente du Front national Marine Le Pen, qui avait évoqué une «explosion des chiffres» en matière d’immigration, jeudi dernier lors de ses vœux.
«Contrairement à ce qu’affirme un parti politique qui dit se préoccuper beaucoup d’immigration, le nombre de titres de séjour n’est pas supérieur à celui enregistré lorsque la gauche était au pouvoir. En 2002, le nombre de premiers titres de séjour délivrés a fini par avoisiner 207.000», a-t-il affirmé. Un discours qui laisse entendre que l’UMP est clairement entré en campagne électorale et cherche à récupérer des voix au Front National.
Début 2011, la France, la Belgique et les Pays-Bas avaient annoncé le renvoi en République démocratique du Congo soixante Congolais vivant dans ces pays.
Fin avril, une soixantaine de Congolais expulsés d'Europe pour séjour irrégulier étaient arrivés à Kinshasa à bord d’un avion d’Air Bus affrété par le Frontex, une agence qui coordonne la coopération entre les pays membres de l'Union européenne (UE) en matière de gestion des frontières extérieures.
Tout en reconnaissant la souveraineté des pays qui expulsent les Congolais, le gouvernement de la RDC s’était réservé le droit d’appliquer le principe de réciprocité au cas où ces expulsions concerneraient aussi des Congolais installés régulièrement en France, en Belgique ou aux Pays-Bas. «Nous regrettons cette expulsion. Il ne nous revient pas à nous, RDC, d’imposer nos compatriotes en terre étrangère. Nous vérifions s’ils ont été expulsés dans les conditions qui respectent la législation en la matière», avait réagi le ministère congolais des Affaires étrangères.
Lesoir.be/LP
Par RICH NGAPI
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