(Le Potentiel 25/10/2011) La résolution des conflits dans la région de Grands Lacs passe par le partage des ressources transfrontalières et le commerce transfrontalier entre les pays des Grands Lacs, dit-on. Cette logique non seulement légitime et légalise les pillages de richesses de la RDC à travers la mise en place de la CEPGL, CIRGL, mais aussi contribue à l’effacement des traces des 5,4 millions de morts congolais.Depuis la publication de quatre rapports des Nations unies sur les pillages de richesses de la RDC, aucune société multinationale ou aucun pays pilleur n’est inquiété ni traduit en justice, à part l’Ouganda qui a été condamné par la Cour internationale de justice, à payer à la RDC 10 milliards dollars Us à cause de la guerre de 6 six jours contre le Rwanda à Kisangani. Le régime de Kagame n’ayant pas reconnu la compétence de la Cour internationale de justice, Kigali a échappé à la condamnation.
Au lieu de condamner ces multinationales et ces pays agresseurs pour les pillages de ressources de la RDC, après avoir fait pression sur les Nations unies pour éviter la publication desdits rapports, les gouvernements occidentaux soutiennent la création de la Conférence internationale de la région de grands Lacs (CIRGL) et la renaissance de la Communauté des pays des Grands Lacs. Dans ce contexte, un nouveau discours est développé par certains hommes politiques et certains africanistes occidentaux : le partage des ressources transfrontières. Pour faire asseoir ce nouveau discours, les bailleurs des fonds occidentaux et certaines ONG locales et internationales organisent des séminaires, des ateliers et d’autres forums au Congo et dans les sous-régions d’Afrique centrale et australe.
Les donateurs ou les bailleurs de fonds de ces ONG ne sont autres que des gouvernements et ONG occidentales dont les sociétés ont été impliquées dans la guerre de prédation des richesses à l’Est de la RDC, pour la plupart citées dans les rapports des Nations unies.
En dehors du partage des ressources transfrontalières, l’idée du commerce transfrontalier est lancée par les bailleurs de fonds. Selon ces derniers, le commerce entre les populations transfrontalières peut contribuer à mettre fin aux conflits armés dans la sous-région.
Cette conception de résolution des conflits armés soulève certaines interrogations. Tous les observateurs de la région des Grands Lacs soulignent que les guerres dans les Grands Lacs sont des guerres de mines. Deux Canadiens dans leur ouvrage «Noir Canada, pillages et corruption en Afrique», ont démontré que les multinationales domiciliées au Canada et dans Iles Vierges ont financé et soutenu la guerre d’agression menée contre la RDC par le Rwanda, le Burundi et l’Ouganda pour le contrôle des mines. Ce ne sont pas de paysans rwandais, ougandais ou burundais qui connaissent l’utilisation du coltan, cassitérite et autres minerais. Les Congolais, Rwandais, Ougandais et Burundais ont toujours fait leur commerce sans qu’il y ait un intermédiaire. Mieux, ils ne se sont jamais fait la guerre.
Par ailleurs, ni le Rwanda, ni l’Ouganda encore moins le Burundi ne disposent pas d’usines de transformation du coltan et autres minerais.
Qu’est-ce-qui se cache derrière tous ces discours sur le partage des ressources transfrontalières, le commerce transfrontalier et la mise en place des organisations sous-régionales telles la CEPGL et la CIRGL ? Trois explications.
D’abord, la légitimation des pillages des richesses de la RDC. Mécanisme par lequel le Rwanda, l’Ouganda, les multinationales peuvent puiser des richesses du Congo sans aucunes inquiétudes. A travers le commerce transfrontalier, les opérations qui se passaient dans la nuit vont désormais se passer en plein jours.
Les frontières entre le Rwanda et la RDC n’existent plus dans le cadre de la CEPGL. Kigali et Kampala deviendront les voies par lesquelles les minerais de guerre peuvent être vendus, sans gêne, aux acheteurs occidentaux et orientaux. Dans cette légitimation de pillages de ressources de la RDC, le Rwanda sera la plaque tournante. A cet égard, le romancier britannique John Le Carré dans «le Chant de la mission» souligne que «le plan américain, c’est consolider la présence économique et commerciale du Rwanda au Congo oriental (Est de la RDC) jusqu’à la rendre incontournable». Les multinationales occidentales prévoient déjà la mise en place d’une bourse de matières premières. Or, le Rwanda n’a presque pas de minerais. D’où viendraient ces minerais ? Bien sur de la RDC. D’ailleurs, l’ancien Premier ministre britannique Tony Blair serait le conseiller économique du président rwandais Paul Kagame.
Ensuite, la légalisation des pillages est formalisée à travers les organisations sous-régionales comme la Communauté économique des pays des Grands Lacs et la Conférence internationales des grands lacs africains. A cet égard, l’idée de marché commun de l’ancien sous-sécrétaire d’Etat américain aux affaires africaines, M. Herman Cohen, illustre bien cette formalisation. Herman a proposé dans son article de décembre 2008 paru dans «New York Times» qu’il faut établir un marché commun entre les provinces de l’Est du Congo et le Rwanda, le Burundi et l’Ouganda, pour légaliser le trafic des produits miniers et agricoles …
Enfin, l’effacement des traces du fleuve de sang des 6 millions de Congolais. Tout est mis en place pour brouiller les traces pour que les jeunes congolais et congolaises n’aient pas de repères historiques. Ce n’est pas la première fois que les capitalistes prédateurs mettent en place des stratégies pour effacer les pages noires de l’histoire congolaise. En effet, entre 1885 et 1907, le roi des Belges, Léopold II et l’Etat Indépendant du Congo ont fait un génocide de 10 millions des congolais à cause du caoutchouc qui devraient entrer dans la production des pneus. Et pour effacer les traces du sang des Congolais, la communauté internationale de l’époque a proposé que l’Etat indépendant du Congo devient le Congo-belge sans qu’il y ait procès contre le roi Léopold II et les capitalistes prédateurs. Curieusement, l’histoire se répète. La mise en place de la CEPGL et CIPGL s’inscrit dans cette même logique de négation de l’histoire douloureuse des Congolais.
Par Freddy mulumba kabuayi
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