(Direct.cd 26/02/2013)
Après les accrochages sanglants du dernier week-end entre les hommes du général Sultani Makenga, chef militaire du M23, et ceux de Jean-Marie Runiga, chef politique de ce mouvement rebelle, il est difficile de savoir si la rupture est totale entre les deux pions du Rwanda. Officiellement, on laisse entendre que te galonné serait pour le respect du cessez-le-feu décrété unilatéralement par son mouvement en décembre 2012 tandis que le civil, paradoxalement, serait pour la relance des hostilités.
La pomme de discorde se situerait au niveau de leur lecture différente de l’Accord-cadre pour la paix en République Démocratique du Congo, signé par les Chefs d’Etats ou les représentants de onze pays de l’Afrique Centrale, des Grands Lacs et de l’Afrique Australe. Le général Makenga souhaiterait que le M23 prenne en compte les résolutions d’Addis-Abeba dans ses relations futures avec le pouvoir en place à Kinshasa tandis que Jean-Marie Runiga affirme que la rébellion n’est pas concernée par ce deal politique.
Quel message venu de Kigali?
Pour mieux cerner le fond des divergences survenues entre les deux responsables les plus influents du. M23, il faudrait connaître la nature du message qu’ils ont ramené de Kigali, où ils étaient appelés en consultation en milieu de semaine, à quelques jours de la signature de l’Accord-cadre pour la paix en République Démocratique du Congo. Les observateurs constatent que le président rwandais Paul Kagame, bien qu’ayant signé le document élaboré par les Nations Unies et l’Union Africaine dimanche à Addis-Abeba, a émis des réserves au sujet de l’existence même de l’Etat congolais, la bonne gouvernance, la sécurité, la réconciliation nationale…
Il y a gros à parier que pour ne pas avoir à subir une nouvelle foudre de la communauté internationale, l’homme fort de Kigali doit avoir donné des consignes précises à Makenga et Runiga, afin qu’ils montent de toutes pièces le scénario d’un vrai-faux conflit interne au sein du M23, lequel devrait permettre à l’un ou l’autre de dénoncer l’Accord-cadre du 24 avril février.
Nkunda-Ntaganda et Ntaganda-Makenga : jamais deux dans trois …
En mars 2009, peu avant la signature de l’Accord controversé entre le CNDP (Conseil National pour la Défense .du Peuple) et le gouvernement congolais, le Rwanda s’était organisé pour opérer une révolution de palais au sein de ce mouvement insurrectionnel, au terme de laquelle le général Laurent Nkunda avait passé le témoin à son commandant second, le général Bosco Ntaganda. On ne connaît pas les détails du limogeage de cet officier supérieur qui avait occupé momentanément la ville de Bukavu en juin 2004 et qui était foncièrement opposé aux opérations de « brassage » entre combattants rebelle et militaires loyalistes au sein des FARDC (Forces Armées de la République Démocratique du Congo). Mais, l’on croit savoir que Kigali ne voulait pas que Nkunda constitue un élément de blocage dans les manoeuvres militaires mixtes congolo-ougando-rwandaises soit disant destinées à la chasse aux forces négatives à l’Est de la RDC, dont chacun a pu finalement constater le grand fiasco.
Il y a eu ensuite le feuilleton Ntaganda-Makenga, dicté par la peur du Rwanda de voir le CNDP disqualifié complètement sur la scène internationale, suite à la mise à l’index du général Bosco Ntaganda par la Cour Pénale Internationale. Dans le souci de conférer à son bras armé en RDC une nouvelle virginité, Kigali lui a suscité en mars -avril 2012, sans transition, le M23 (Mouvement du 23 mars 2009). Sans forcer la note, Sultani Makenga a pris la tête de cette rébellion et entrepris de conquérir les territoires de Masisi et Rutshuru, poussant son épopée militaire jusqu’à Goma, en novembre de la même année.
Avec l’échec non avoué des négociations de Kampala entre le M23 et le gouvernement de Kinshasa ainsi que la signature, depuis le dimanche 24 février, de l’Accord-cadre pour la paix en RDC, sous le quadriple parrainage de l’ONU, de l’UA, de la CIGRL et de la SADC, l’un des deux hommes forts de cette rébellion devrait inévitablement s’effacer. Apparemment, Kigali adore les changements de leadership au sein des mouvements rebelles à sa solde, comme c’était le cas au RCD (Rassemblement Congolais pour la Démocratie) entre 1998 et 2003. Les remous qui secouent présentement le M23 sont certainement annonciateurs d’une nouvelle restructuration, selon la nouvelle mission que le Rwanda compte confier à Makenga ou Runiga, pour le malheur du peuple congolais. Les bruits de bottes que les protégés de Kigali font entendre dans la périphérie de Goma ne sont pas de bon augure pour la pacification et la stabilisation de la partie Est du pays.
Les Congolais devraient rester vigilants et ne pas se laisser distraire par la nouvelle pièce de théâtre en préparation à Bunagana ou Rutshuru.
Kimp
Par La Rédaction
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