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mardi 29 janvier 2013

Les eaux de la RDC : risque d’instabilité ou opportunité de développement?

(Le Potentiel 29/01/2013)
La République démocratique du Congo (RDC), qui n’est pas seulement un géant minier et forestier, mais également gracieusement nantie des ressources hydrologiques les plus importantes au monde, ne risque-t-elle pas de subir une nouvelle guerre de l’eau ?

Elle est, en effet, le seul pays africain qui fait partie du très select club de neuf (9) puissances mondiales de l’eau (Brésil, Russie, Chine, Indonésie, RD Congo, Colombie, Inde, Canada, États-Unis) qui se partagent à eux seuls 60 % du débit annuel mondial.
Selon le rapport technique du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) de 2011, les eaux de surface de la RDC représentent environ 52% des réserves en eau de l’Afrique et 23% des ressources hydriques renouvelables du continent. Mais, malgré ces immenses ressources en eau douce, seuls 26% de la population congolaise ont accès à une eau potable salubre, alors que la moyenne pour l’ensemble de l’Afrique subsaharienne est de 60%.
L'utilisation actuelle des ressources mondiales accessibles en eau environne les 50% et pourrait s'élever jusqu’à 70% d’ici 2025. Or, les nouvelles sources d'approvisionnement sont de plus en plus coûteuses à exploiter en raison de leur éloignement, de l’inaccessibilité (nappes aquifères profondes, sources montagneuses, etc.) et des impacts environnementaux impliqués.
Ces contraintes laissent entrevoir des pénuries grandissantes dans plusieurs régions du monde.
En raison d’une répartition inégale de l’eau douce sur la planète, de l’offre limitée et de la demande sans cesse croissante à cause notamment de la croissance démographique et économique mondiale, l’eau pourrait venir à manquer dans plusieurs régions du monde. Ce qui pourrait à la longue alimenter les convoitises et les appétits gloutons de certains, et ainsi devenir une source des conflits à venir entre les États.
2013 : Année internationale de la coopération dans le domaine de l’eau.
Pour anticiper les solutions aux problèmes que soulève la gestion de l’eau dans le monde, l’Assemblée générale des Nations Unies a, dans sa Résolution A/RES/65/154, proclamé 2013 « Année internationale de la coopération dans le domaine de l’eau ».
L’UNESCO a été chargé officiellement par l’ONU-Eau (en raison notamment de son approche multidisciplinaire qui concilie à la fois les sciences naturelles et sociales, l’éducation, la culture et la communication) pour cerner les questions brûlantes concernant la gestion des eaux transfrontalières, les cadres juridiques, l'éducation et la diplomatie de l'eau, afin de mieux sensibiliser les Etats aux possibilités de développer la coopération internationale pour faire face aux défis que représente la demande mondiale toujours croissante.
L’eau, un enjeu stratégique mondial
Source de vie, l’eau est un bien précieux parmi les plus inégalement répartis à la surface du globe. En effet, la Terre est certes recouverte abondamment d'eau, mais l'eau douce n’est pas suffisante et accessible pour l'usage de tous les êtres humains. Ainsi, certains pays en ont gracieusement, alors que d'autres en manquent cruellement et d’autres encore connaissent de périodes prolongées de sécheresse. Les effets liés au réchauffement climatique viennent complexifier davantage la rareté de l'eau dans certaines régions du monde.
Du coup, l’existence de réserves en eau prend une nouvelle dimension et la bataille pour contrôler cette ressource vitale devient prioritaire pour les pouvoirs politiques, car elle est indissociable à la pérennité existentielle de leurs États.
Selon la 4ème édition du rapport mondial des Nations Unies sur la mise en valeur des ressources en eau, intitulé « Gérer l’eau dans des conditions d’incertitude et de risque », les grands réservoirs d’eau douce au monde se trouvent dans neuf pays dont la RDC, qui se partagent à eux seuls 60% des ressources mondiales en eau douce.
Barah Mikhaïl, dans « L’eau, source de menaces? », s’interroge sur les enjeux posés par l’eau (statut, utilisation et défis géopolitiques). Il note que l’eau est un enjeu vital et source potentielle de tensions sérieuses entre les États. L’auteur mentionne que si le 20ème siècle a été dominé en partie par des enjeux de type pétrolier, le vingt-unième (21e) pourrait voir des affrontements liés par la volonté d’accaparement et du contrôle de l’eau.
Les rapports de forces au niveau international sont tels que la communauté internationale doit batailler fort pour préserver cette ressource qui pourrait être un moteur des conflits du troisième millénaire.
Les désaccords sur la répartition de certaines eaux déclenchent régulièrement des conflits dans le monde. Plus proche de la RDC, il y a les eaux du fleuve Nil «en ébullitions» qui pourraient devenir une cause d’un conflit continental si elles ne peuvent bénéficier à tous les pays concernés.
L’eau du Nil, un enjeu stratégique africain
Le Nil est le 3ème plus grand bassin versant du monde, après ceux de l'Amazone et du fleuve Congo. Il prend sa source dans les montagnes proches de la RDC et du Burundi, couvre près de 10 % du continent africain, et traverse actuellement onze États (RD Congo, Burundi, Rwanda, Tanzanie, Kenya, Ouganda, Soudan, Sud Soudan, Éthiopie, Érythrée et l’Égypte situé en aval) avant de se jeter dans la mer Méditerranée.
Cette vallée du Nil reste une source potentielle des conflits et une poudrière qui pourrait éclater et menacer la paix et la sécurité en Afrique. En effet, près de 300 millions d’habitants vivent le long du bassin du Nil. Mais, seul l’Égypte tire le plus grand profit tant sur le plan économique, social et agricole en fertilisant ses terres.
Avec la densité démographique de pays riverains du bassin du Nil, certains d’entre eux notamment l’Éthiopie et le Kenya rejettent l’accord de partage signé en 1959 entre l’Égypte et le Soudan qui allouait 55,5 milliards de mètres cube d’eau au premier et 18 milliards au second, - soit près de 90% du volume annuel du fleuve pour les deux pays -, et réclament un nouveau partage des eaux du Nil.
Il y a lieu de noter que l’Égypte a toujours invoqué la doctrine juridique, dite de « la première appropriation » qui fait force de loi dans la plupart des États et qui fait valoir le droit de propriété à tout État, soit-il d'amont ou d'aval, prouvant le premier l'accaparement d'un débit donné, est susceptible de se voir confirmer sa mainmise sur la ressource convoitée et d'en refuser le partage à tout autre prétendant.
Cette situation empoisonne les relations entre les Etats riverains et risque d’imploser un jour si rien n’est fait pour garantir un usage équitable et rationnel des eaux du fleuve du Nil.
Qu’en est-il de la situation de l’eau en RDC?
Au niveau national, bien que la RDC regorge d’importantes réserves en eau, trois quarts (¾) de sa population n’ont toujours pas accès à l’eau potable salubre. Plus grave. L’eau de pluies, qui sert parfois comme une solution pour certains pays qui en manquent cruellement, est une cause en RDC d’inondations dans plusieurs grandes villes, causant ainsi des glissements de terrain, des destructions d’habitations, voir même des pertes en vies humaines.
Au niveau régional, avec neuf pays voisins, la RDC a plusieurs sources d’eau qu’elle partage avec certains d’entre eux et qui constituent parfois de frontières naturelles (fleuve Congo, rivière Oubangui, lac Kivu, lac Tanganyika, etc.). Il est bon de savoir que l’eau est un enjeu stratégique : politique, économique et diplomatique.
En effet, les cours d’eau qui séparent les Etats cachent parfois des ambitions de domination des uns sur les autres. Ainsi, ceux qui sont situés en amont des cours d’eau peuvent s’en servir comme instrument de pouvoir pour faire pression voir même les chantages aux États qui leur sont hostiles.
Au niveau international, la notion de « droit à l’eau » est au cœur des débats internationaux. L'Assemblée générale des Nations Unies a reconnu l'accès minimum équitable à l’eau salubre comme l’un des droits fondamentaux de l’être humain: « le droit à une eau potable propre et de qualité et à des installations sanitaires est un droit de l'homme, indispensable à la pleine jouissance du droit à la vie ».
Mais, cette notion du « droit à l’eau » est également accompagnée de celle du « prix de l’eau ». La privatisation de l'eau en vue de sa distribution par les grandes multinationales fait son petit bonhomme de chemin.
En 1992 déjà, l’eau fut déclarée « bien économique » à la conférence de Dublin et fait actuellement l’objet d’une vision marchande. L’Accord général sur le commerce des services (AGCS) de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) étudie les scénarios pour exiger aux États de privatiser les services de l'eau.
Au regard des enjeux non exclusifs présentés ci hauts, l'eau devient une source d'inquiétude majeure pour les États qui en ont gracieusement, mais n’ont aucune politique publique pour tirer profit de cette richesse potentielle. Par contre, elle est une opportunité de développement pour ceux qui savent la mettre en valeur pour assurer leur prospérité économique.
Il serait intéressant de savoir quels sont les politiques publiques que la RDC, - seul pays africain qui fait partie du club très select de «puissants de l’eau» -, a ou compte mettre en place, à l’instar de huit autres homologues pour tirer profit de cette ressource précieuse.

Écrit par Isidore Kwandja Ngembo

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