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mercredi 23 novembre 2011

Campagne électorale : Le gouvernement en ordre dispersé, un ministre candidat assume l’intérim de plus de dix autres

(L'Avenir Quotidien 23/11/2011)

Plus de 20 ministres se sont lancés, depuis le 28 octobre 2011, dans la campagne qui doit se clôturer le samedi 26 novembre prochain, en vue de leur élection à la députation nationale, laissant ainsi leurs postes vacants et des administrations tournant au ralenti. La CENI et le Parlement sont donc interpellés, eux qui ont exigé aux fonctionnaires et agents de l’administration publique la mise en disponibilité, aux mandataires actifs la démission, mais rien aux ministres. *Des sources sûres, nous apprenons que le ministre des Affaires foncières, lui-même candidat député dans la Funa, assume l’intérim d’une dizaine de ministères. Comme on peut bien l’observer, sa table est pleine de dossiers qui tardent à être traités : et dans certains ministères, c’est le climat de week-end qui règne. Même si la situation n’est pas gravissime comme le dit un membre du Gouvernement, celle – ci aura porté un coup dur au fonctionnement normal du pays.

A quelques jours des élections du 28 novembre 2011, le Gouvernement de la République reste plongé dans l’immobilisme, pour la simple et bonne raison que presque tous les ministres sont en campagne électorale. En Rd Congo, l’immobilisme a toujours été une de faiblesses du Gouvernement. Ceci, lorsqu’on sait que les actuels membres de la Majorité présidentielle font tout pour conforter une majorité absolue, qui leur permettra de bien gérer le pouvoir demain. Sans pour autant être contraint de le partager, faute d’une majorité parlementaire digne de ce nom.
Pour y arriver, ils ne se sont pas gênés de tout abandonner à Kinshasa, en se lançant dans une campagne, qui est tout à fait normal, mais à plusieurs inconnues. Parmi les ministres qui sont en campagne, on cite Raymond Tshibanda, Charles Muando Nsimba, Lambert Mende Omalanga, Jean-Baptiste Ntahwa, Olivier Kamitatu, Jeannine Mabunda, Jean-Pierre Daruwezi, José Endundo, Gilbert Tshiongo, Célestin Mbuyu, Victor Makweng, Léonard Mashako, Maker Mwangu, Anicet Kuzunda, Jean-Marie Bulambo, Marie-Ange Lukiana, Maj Kisimba, César Lubamba, Simon Bulupiy, Benoit Kambere, etc. A cette liste, il faut aussi ajouter le Chef du Gouvernement lui-même, qui est candidat à Kikwit.
Au vu de cette situation, c’est donc la CENI et le Parlement qui sont interpellés. Ceci, parce que c’est la CENI qui a été à la base de la loi électorale, qui a par la suite été votée par le Parlement. Les deux Institutions se sont contentées d’exiger aux fonctionnaires et agents de l’administration publique une mise en disponibilité ; aux mandataires actifs une démission, etc., pendant que rien n’a été prévu pour les ministres qui, du reste, sont en fonction. S’il y a des dispositions à revoir, l’article 10 de la loi électorale qui parle de l’inéligibilité devra être le premier à attirer l’attention des honorables députés de la prochaine législative.
L’article 93 de la Constitution stipule que le ministre est responsable de son département. Il applique le programme gouvernemental dans son ministère, sous la direction et la coordination du Premier ministre. Curieusement, les catégories pour lesquelles le législateur a exigé une démission ou une mise en disponibilité n’ont pas des fonctions clairement définies par la Constitution, surtout qu’ils dépendent de leurs ministres de tutelle. Cette affirmation est confirmée par l’article 96 de la même Constitue qui stipule : « Les fonctions de membre du Gouvernement sont incompatibles avec l’exercice de tout mandat électif, de tout emploi public, civil ou militaire et de toute activité professionnelle à l’exception des activités agricoles, artisanales, culturelles, d’enseignement et de recherche. Elles sont également incompatibles avec toute responsabilité au sein d’un parti politique ».
Même si en principe l’article 96 de la Constitution de 2006 ne doit pas être appliqué à leur endroit, avouons tout de même que son interprétation devrait permettre au Gouvernement de prendre des mesures, afin de ne pas tomber dans l’immobilisme. Car en réalité, comment justifier que l’on puisse permettre à ce qu’un ministre, de surcroît candidat dans sa propre circonscription, assume l’intérim de plus de 10 ministres ? Aura-t-il valablement assez de temps pour s’occuper de son propre ministère, au risque de bâcler les choses ? Ici, les conséquences ne se sont pas fait attendre. Déjà, on nous annonce que le ministre a une pile de dossiers sur sa table qu’il ne sait pas régler. Même s’il doit les régler, il faut éviter que certains dossiers sensibles ne soient traités avec légèreté. Fait que le législateur aurait évité à la nation. Au-delà de ce fait, les ministères et certaines administrations sont abandonnés et donnent une image de week-end, pendant que l’Etat doit continuer à fonctionner. Et s’il y a des fonctionnaires qui viennent quand même à leurs lieux de travail, ils ont tout simplement l’air démotivé.
En réalité, une fois qu’un ministre s’est lancé dans la campagne électorale en vue de son élection à la députation, la logique aurait obligé à celui-ci de démissionner de son poste, pour permettre à l’Etat non seulement de continuer à fonctionner, mais aussi au candidat de battre sa campagne en âme et conscience. Et si l’Etat fonctionne normalement, on va assurer la continuité des services publics ainsi on aura répondu aux doléances de la population. Mais si l’on doit disparaître plus de 20 jours et bloquer le fonctionnement des administrations, cela ne peut qu’être suicidaire pour les populations qui attendent beaucoup d’eux.
La situation n’est pas gravissime
Pour le porte-parole du gouvernement et ministre de la Communication, Lambert Mende, cité par notre source, la situation n’est pas gravissime puisqu’elle va « s’arrêter dans moins de 10 jours » et « redevenir normal ». Il est vrai que les ministres diront que ce que la loi n’interdit pas est autorisé, mais cela ressemble à une tricherie. D’autant plus que les mandataires actifs qui auront fait leur remise-reprise ne vont plus retourner dans leurs entreprises respectives. Et ce, pendant que le ministre, lui, retournera très sûr d’avoir bien fait sa campagne.
Le fait pour plus de 20 ministres d’avoir abandonné leurs bureaux et de s’être livrés à la campagne électorale n’est pas du tout une mauvaise chose en soi, d’autant plus que certains membres de cabinet assurent la permanence et traitent les dossiers qui leur parviennent, avant de les confier à celui qui assume l’intérim. Mais il faut vite faire attention, car c’est pendant ces temps précis qu’il est permis de glisser de mauvais dossiers, voire ceux qui sont compromettants. Et c’est la bonne foi du ministre qui risque d’être trompée, avec comme conséquence de retomber dans la revisitation des accords ou des contrats signés.
Il ne faut pas oublier que nous sommes dans un pays où le pourcentage a encore droit au chapitre. Ainsi, certains hommes d’affaires ou investisseurs risquent d’être préjudiciés dans leur élan, au seul motif que le ministre qui a la signature est en campagne.
Pour ne pas sombrer dans l’immobilisme dont le Gouvernement a toujours été accusé, on devrait travailler en amont afin d’éviter de tomber facilement dans cette situation. Sinon, c’est donner de la matière à une opposition qui n’attend qu’une petite faille pour mettre en difficulté le Gouvernement. Et à quelques jours des scrutins, cela risque de se payer cash.
Pendant que le franc congolais est en train de prendre sa revanche sur le dollar américain, la population a besoin des assurances du Gouvernement. Des assurances selon lesquelles la situation serait par exemple la conséquence de la bonne gestion du cadre macroéconomique et non la conséquence d’une certaine agitation. C’est le moment aussi que le Gouvernement trouverait pour expliquer à la population que ce qui arrive, ce n’est pas parce qu’on ne paye pas les fonctionnaires, etc. Mais lorsqu’on ne dit rien, la population risque de consommer la première eau à sa disposition, peu importe qu’elle soit potable ou pas. Si le Gouvernement qui a pour mission constitutionnelle de conduire la politique de la nation ne le fait parce qu’il est en campagne électorale, ne soyez pas étonné qu’il puisse évoluer en ordre dispersé.

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