(L'Avenir Quotidien 25/11/2011)
A trois jours des élections du 28 novembre 2011, deux scenarii possibles peuvent être mis en exergue tant pour la Majorité qui va conforter sa position de favori, que pour l’opposition qui peut créer un miracle. La première possibilité, l’opposition part en ordre dispersé aux élections présidentielles et Joseph Kabila Kabange va grignoter un pourcentage, petit soit-il, mais qui le sortira gagnant du scrutin. * L’autre possibilité serait qu’en dernière minute, l’opposition se mette d’accord pour une candidature unique et certaines rumeurs font état d’un deal dans ce sens que l’opposition espère sortir de sa manche au moment opportun. Un tel scénario aura l’avantage de mobiliser beaucoup d’électeurs qui souhaitent une alternance. * Pour réussir les élections en Rd Congo, il ne suffira pas seulement de veiller aux mécanismes politico-politiciens sous la supervision de la CENI, mais de changer la vision des élections et bâtir une démocratie communautaire dont la respiration de fond et le souffle de vie soient la mobilisation du génie créateur des populations congolaises dans un projet fondamental de faire de ce pays le modèle d’une nouvelle politique de l’humain.
Dans sa revue trimestrielle intitulé : « République démocratique du Congo : aux urnes, citoyens », l’Ong Pole Institute publie les avis de plusieurs analystes qui donnent Joseph Kabila favori à la course présidentielle de 2011. Et ce, à cause notamment de ses nombreux atouts et surtout de la carte de stabilité régionale qu’il a su bien jouer en se rapprochant de ses voisins de l’Est, notamment le Rwanda, le Burundi et l’Ouganda. Ces atouts font de Kabila un candidat de l’unité capable de maintenir le Congo dans son état actuel. Une observation partagée par bon nombre de chancelleries occidentales à Kinshasa.
En effet, ces avantages de Joseph Kabila, souligne le document, ne le rendent pas nécessairement populaire. A l’Est du pays, bon nombre de populations lui reprochent son rapprochement avec le Rwanda et se sentent trahies par lui. L’engouement des populations de l’Est du pays qui avaient voté pour lui à 90% en 2006 semble s’être estompé et il serait difficile à quelques jours des élections d’envisager comment récupérer cet électorat. C’est dans ce contexte que deux scénarii sont possibles. L’opposition part en ordre dispersé aux élections présidentielles et Kabila parvient à grignoter un pourcentage, petit soit-il le sort gagnant du scrutin. Dans ce cas de figure, il devra compter avec une population kinoise pour laquelle « le Congo c’est Kinshasa et Kinshasa c’est le Congo » et qui ne supportera sans doute pas un Joseph Kabila qui n’aura pas été élu par la majorité de Kinois.
L’autre possibilité serait qu’en dernière minute, l’opposition se mette d’accord pour une candidature unique et certaines rumeurs font état d’un deal dans ce sens que l’opposition espère sortir de sa manche au moment opportun. Un tel scénario aura l’avantage de mobiliser beaucoup d’électeurs qui souhaitent une alternance.
D’ailleurs, selon Radio Okapi qui cite Etienne Tshisekedi , candidat à l’élection présidentielle de 2011, celui-ci indique qu’aujourd’hui, au stade Tata Raphael, le Secrétaire général de l’UDPS va lire le programme commun de gouvernement de demain et nous allons tous le signer. Il a précisé qu’agissait du projet de société de l’UDPS qu’il a proposé aux candidats pour en faire le programme commun de gouvernement, après leurs amendements. Est-ce pour autant dire qu’il sera désigné candidat commun de l’opposition ? A cette question il répond comme suit : « « Je n’ai jamais été d’accord avec les gens qui disent que l’opposition doit avoir un candidat commun pour gagner. Ça n’a rien affaire ! Le peuple congolais sait où il va [et] ce qu’il va faire. Les candidats peuvent être [au nombre de] de mille, ça ne va absolument rien changer à la situation. » A cet effet, il faut déjà exclure l’idée que les candidats de l’opposition à la présidentielle se mettront ensemble en vue d’une candidature commune. Même si le miracle est toujours permis, même en dernière minute.
L’Ong reste sceptique
Selon toujours la même Ong, aucun de ces deux scénarii n’augure une bonne nouvelle pour les échéances électorales 2011 et l’incertitude continue à planer dans les esprits des Congolais. D’autant plus que sur le front économique, la croissance annoncée de 6% n’est pas vraiment palpable. Le marché des minerais qui constituait la colonne vertébrale de l’économie de l’Est du pays est quasiment paralysé depuis que les consommateurs finaux comme Appel et Motorola ont été effrayés par la loi Dodd Franck de juillet 2010 qui les oblige à prouver que les minerais achetés au Congo ne sont pas des minerais de sang qui financent les groupes armés.
Plusieurs initiatives pour rendre propre ce secteur minier à l’Est du pays notamment, l’étiquetage et la certification de l’origine des minerais, dépendent de la reprise des activités minières. Quelques comptoirs chinois et indiens qui misent sur le marché interne de ces deux pays démographiquement géants achètent toujours le peu de minerais produits mais sont loin d’insuffler une reprise réelle.
Des tendances se dessinent
Si on s’en tient à ce qui se dit et s’écrit sur le processus électoral de 2011 en Rdc, il y a lieu de distinguer trois grandes tendances qui se chevauchent et s’affrontent actuellement dans de secousses et de tremblements de verbe dont la magnitude s’élèvera au fur et à mesure qu’approchera l’heure des élections. Surtout le moment de l’élection présidentielle qui semble accaparer toutes les attentions, comme si elle était la seule clé de la destinée et l’unique nœud à dénouer pour libérer l’avenir.
D’un côté, la revue entend siffler le train d’un discours idyllique qui exige des élections libres, transparentes, honnêtes, justes et crédibles. S’irise dans ce discours une sorte d’angélisme qui compte sur les bailleurs de fonds internationaux pour contraindre ou aider la Rdc à organiser des élections fiables, dont les résultats ne puissent être contestés par personne.
A travers des tournées de leaders congolais dans le monde occidental comme dans l’étincellement des vœux pieux formulés par toutes les bonnes âmes qui aiment le Congo partout dans le monde, on espère que ceux qui paient, en espèces sonnantes et trébuchantes, pour que les élections aient lieu en Rdc pourront s’investir dans l’organisation des conditions favorables à la réussite d’un processus électoral qu’ils ont eux-mêmes désiré. « Cette attente se fonde sur le fait que certains pays africains ont organisé des élections fiables grâce à l’aide de la communauté internationale, grâce à la sollicitude des bailleurs de fonds et grâce à une pression ininterrompue qui a épargné aux populations les troubles habituels d’une Afrique dont beaucoup de chefs sont réfractaires à l’expression d’une démocratie qu’ils ne peuvent pas contrôler ni soumettre à leur volonté de se perpétuer au pouvoir », indique l’étude dont l’Avenir a reçu une copie.
En face de cette tendance qui cherche des conditions idylliques pour l’organisation des élections se tiennent les pessimistes de tous bords, avec leurs tonitruants discours qui émergent des abîmes des peurs et des terreurs déjà endurées par l’Afrique à plusieurs occasions. Ces pessimistes torrides semblent savoir à priori qu’il est inutile d’attendre une élection crédible en Rdc aujourd’hui. Ils affirment que les dés sont pipés et qu’une gigantesque farce va se déployer dont les résultats seront contestés dans un processus postélectoral calamiteux, selon un scénario bien connu sous les tropiques.
Dans un contexte où la dévolution du pouvoir politique en Afrique a toujours dépendu des « faiseurs de rois » étrangers, qui n’ont que faire de la volonté du peuple, on voit mal, disent les pessimistes, comment il serait possible qu’une élection puisse s’organiser sans que le vainqueur soit déjà désigné par les vrais lieux mondiaux de décision.
Dans cette optique, les experts qui ont contribué à cette étude craignent que la campagne électorale qui s’achève demain samedi esquisse les questions essentielles sur le sens même du processus électoral dans un pays comme la Rdc, confrontée à de gigantesques défis de sa reconstruction au bout de cinq décennies d’une indépendance chaotique et d’une autodétermination manquée.
Disons quand même que la campagne électorale en Rd Congo a permis à plusieurs candidats de s’exprimer sur différents sujets, même si ceux-ci ont été préparés d’avance. Ainsi, différents candidats ont expliqué à l’opinion ce qu’ils feront une fois au pouvoir en ce qui concerne la politique, la diplomatie, le social des congolais, la santé, l’éducation, les infrastructures, etc.
Mobiliser le génie créateur
Pour réussir les élections au Congo, l’étude intitulée : « République démocratique du Congo : aux urnes, citoyens » de l’Ong Pole Institute pense qu’il ne suffira pas seulement de veiller aux mécanismes politico-politiciens sous la supervision de la CENI ou de donner à la multitude de partis politiques l’opportunité d’entrer dans l’arène des scrutins présidentiel, législatif ou local en une bataille sauvage et un combat sans merci.
Il faut plus changer la vision des élections et bâtir une démocratie communautaire dont la respiration de fond et le souffle de vie soient la mobilisation du génie créateur des populations congolaises dans un projet fondamental de faire de notre pays le modèle d’une nouvelle politique de l’humain. C’est là le vrai pari de l’avenir, le vrai défi d’un Congo à la hauteur de son véritable potentiel de démocratie et de développement. Ce Congo-là, il faut l’inventer dans l’imaginaire, dans les pratiques sociopolitiques et dans les institutions dont il faut se doter pour organiser et réussir de vraies élections sur le territoire national.
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