(Le Nouvel Observateur 01/12/2012)
SAKE (RDC) - Des centaines de rebelles congolais du M23 ont
quitté Sake, ville de l'est de la République démocratique du Congo (RDC) prise
la semaine dernière, et ses environs vendredi, mais le repli risque de prendre
encore du temps à Goma, où la rébellion accuse l'ONU de bloquer le
processus.
Environ un millier de rebelles, descendus de collines, ont
traversé vendredi après-midi Sake, à une trentaine de km à l'ouest de Goma, pour
se diriger vers leurs positions initiales plus au nord, ont constaté des
journalistes de l'AFP. Ils devaient a priori contourner Goma, la capitale de la
riche province minière du Nord-Kivu, dont le retrait devait intervenir dans la
foulée.
Les dirigeants du M23 se sont engagés à quitter cette zone et
Goma d'ici à samedi matin, mais vendredi en début d'après-midi, le général
Sultani Makenga, responsable militaire de la rébellion, a accusé la Mission de
l'ONU dans le pays (Monusco) de bloquer les choses.
Le retrait de Goma
"était prévu demain (samedi) mais la Monusco (...) est en train de bloquer la
récupération de notre logistique. On attend que ce problème soit résolu pour se
retirer", a déclaré le général Makenga, sans préciser la nature des effets
logistiques mais soulignant que si le contentieux avec la Monusco n'était pas
réglé, le départ de Goma pourrait à nouveau être retardé.
"Le M23 a
essayé d'entrer à l'aéroport ce matin, la Monusco s'y est opposée," a répondu le
porte-parole de la Monusco, Manodje Mounoubai. "L'aéroport a toujours été sous
notre contrôle et nous allons le tenir jusqu'à son transfert" à une force
tripartite - armée, Monusco et M23 - qui doit prochainement le gérer, selon une
décision des Etats voisins de la région des Grands Lacs, a-t-il
ajouté.
Un responsable d'un mécanisme conjoint de vérification, composé
de plusieurs pays régionaux, a confirmé l'information, précisant que la Monusco
s'est opposée aux rebelles parce qu'ils voulaient emporter des effets militaires
abandonnés par les Forces armées de la RDC (FARDC) à la chute de
Goma.
Quelques centaines de policiers congolais sont eux arrivés vendredi
de Bukavu au port de Goma en prévision du repli des rebelles. Leur mission est
de "sécuriser la ville après le retrait des rebelles du M23" a déclaré à l'AFP
le porte-parole de la mission de l'ONU. Mais ils ne devraient pas être déployés
avant samedi.
Gel de l'aide britannique au Rwanda
Le M23, composé
des mutins qui combattent l'armée régulière de RDC dans le Nord-Kivu depuis
avril, disposerait d'environ 1.500 hommes, selon une source
occidentale.
Ses hommes sont d'ex-rebelles congolais d'origine tutsi qui
avaient été intégrés à l'armée régulière de RDC en 2009, après la signature d'un
accord de paix. Ils se sont mutinés en avril, accusant Kinshasa de n'avoir pas
pleinement respecté les termes de l'accord.
Les mutins refusent notamment
toute mutation hors de leur région du Kivu afin, disent-ils, de protéger leurs
familles et les membres de leur communauté qu'ils estiment en danger. Depuis
leur marche sur Goma, leurs revendications se sont élargies sur le plan
politique, allant jusqu'à remettre en question la légitimité du président
congolais Joseph Kabila, accusé d'avoir fraudé à la dernière
présidentielle.
Le Conseil de sécurité de l'ONU a lui ordonné vendredi
des sanctions contre deux autres chefs du M23, pour avoir notamment tué des
enfants qui cherchaient à fuir l'organisation.
Le Conseil a décidé
d'interdire les déplacements et de geler les avoirs de Baudouin Ngaruye et
Innocent Kaina, deux chefs militaires du M23.
Le Conseil de sécurité et
les Etats-Unis avaient déjà ordonné des sanctions similaires contre Sultani
Makenga.
Aux termes d'une médiation des pays des Grands Lacs, M. Kabila
s'est engagé à examiner les revendications du M23 en échange de leur retrait
militaire.
Kinshasa et l'ONU accusent le Rwanda et l'Ouganda, qui
démentent, de soutenir la mutinerie.
Principal donateur au Rwanda après
les Etats-Unis, le Royaume-Uni a annoncé geler 25,9 millions d'euros de son aide
au développement à Kigali, précisèment en raison de ses "inquiétudes" quant au
soutien présumé rwandais au M23.
Kigali a estimé que ce gel "faisait du
mal au Rwanda sans aider en rien la RDC", rejetant une nouvelle fois "des
allégations fausses et politiquement motivées" à son encontre.
En
attendant, les accusations de pillages se multiplient contre le M23 à Goma,
incitant les commerçants à fermer boutique. "Ils ramassent tout," a lâché une
source militaire occidentale, en parlant du M23.
Selon l'ONG Médecins
sans frontières (MSF), près de 500 personnes ont été blessées depuis la prise de
Goma par le M23. Plus tôt dans la semaine, la Croix-Rouge avait affirmé avoir
ramassé une soixantaine de corps de "civils et militaires" dans les rues après
la prise de la ville.
Créé le 01-12-2012 à 08h16 - Mis à jour à 08h16
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