(Le Potentiel 29/12/2011) Un pas en arrière, deux pas en avant, telle est la cadence préférée du tango de la CENI. Elle danse le tango seule, parfois à trois avec les protagonistes ; Mouvance présidentielle et Opposition. Ou à deux avec la MONUSCO. Drôle de cadence qui ne peut que semer la confusion dans la tête des gens. Comme si la CENI s’entêtait à faire avaler à tout le monde l’adage suivant : «Mieux vaut de mauvaises élections que pas d’élections du tout».
Et voilà qu’après la suspension de la publication des résultats des élections législatives pour de graves irrégularités, la CENI a décidé de la reprise de la compilation des résultats des bureaux de vote. Sans plus. Jusqu’au-boutisme.
Le bureau de la Commission électorale nationale indépendante, CENI, a décidé de la reprise de la compilation des résultats de vote pour les législatives 2011 et de la publication des résultats partiels. Compilation suspendue, il y a de cela une semaine, au motif de l’existence de nombreuses contestations tant sur le plan interne qu’externe au regard de déficiences sérieuses relevées dans les opérations électorales. La CENI justifiait cette décision pour besoin de transparence et de crédibilité du scrutin. Décision saluée par toutes les parties. Mieux encore, la CENI avait sollicité l’implication de la communauté internationale pour l’aider à rectifier le tir. Demande exaucée et les experts de la communauté internationale, venant des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne, sont attendus pour début janvier 2012.
Mais avant que ces experts n’arrivent, la CENI vient de surprendre tout le monde en levant la mesure de suspension pour permettre la reprise de la compilation des résultats et la publication des résultats partiels. Décision surprise parce qu’inattendue et ne pourrait s’expliquer certainement que par l’existence d’un agenda caché. Même l’appel de EL Hadj Mamoud Seto, représentant légal adjoint de la Communauté islamique du Congo, COMICO, n’a pas été entendu : «Avant de commencer même avec des experts qui viendront de l’extérieur, il faut déjà diligenter une enquête, une mission qui doit descendre sur le terrain, avec les inspecteurs de la CENI. La CENI doit se rendre compte de la réalité des revendications et obtenir un rapport fiable qu’elle pourrait ensuite confronter avec le constat des experts internationaux». Rien n’a été fait dans ce sens.
Qu’est-ce qui a changé réellement pour expliquer cette volte-face de la CENI ? Aucune enquête à la connaissance du public tant national qu’international n’a été menée pour identifier les causes exactes de ces graves irrégularités. Sauf un communiqué laconique annonçant la reprise des opérations électorales dans les Centres locaux de compilation des résultats, CLCR : «Le Bureau de la Commission électorale nationale indépendante, CENI, informe l’opinion de la levée, à partir du mercredi 28 décembre 2011, de la mesure de suspension des opérations de compilation des résultats dans tous les Centres locaux de compilation des résultats (CLCR) qui étaient en cours de traitement.
Le bureau de la CENI continuera à publier les résultats partiels des CLCR ayant clôturé la compilation, transmis et affiché les résultats et dont les procès-verbaux de compilation auront été signés par les témoins et n’auront fait l’objet d’aucune réclamation jugée valable et fondée.
La Commission électorale nationale indépendante invite les partis et regroupements politiques ayant présenté les listes ainsi que les candidats indépendants au strict respect des dispositions légales en matière de compilation et de publication des résultats. Signé/Matthieu Mpita- rapporteur». C’est tout. Baratin de tous les jours. Etrange.
JUSQU’AU-BOUTISTE
Oui, étrange. En effet, rien ne justifie cette étrange volte-face de la CENI au moment où tout le monde venait de saluer sa sage décision de requérir l’expertise des experts internationaux pour crédibiliser le scrutin. Curieusement, la CENI joue au jusqu’au-boutiste pour faire accréditer cette piteuse thèse : «Mieux vaut de mauvaises élections que pas d’élections». Une logique qui découle de l’hypothèse selon laquelle la CENI subit des pressions et s’apprête à mettre les experts internationaux devant un fait accompli.
Mettre les experts internationaux devant un fait accompli se traduirait par faire compiler une bonne partie des bulletins de vote, avaliser les irrégularités et rendre difficile le recomptage des bulletins si jamais les experts internationaux s’accordaient sur cette évidence. Telle attitude signifierait que la CENI refuse de saisir cette occasion unique de crédibiliser le scrutin ; qu’elle organiserait ces élections par défi, lançant ainsi un affront à la communauté internationale. Comme pour dire :«Les élections ? Vous les avez ». Bonnes ou mauvaises.
Cette attitude soulève également un certain nombre d’interrogations. Notamment celle liée aux termes de référence. Y a-t-il eu désaccord entre la CENI et la MONUSCO? C’est fort possible.
A quoi aura alors servi cette concertation du mardi 27 décembre, quelques heures avant cette levée de mesure, entre le président de la CENI et le ministre de la Justice pour sanctionner les auteurs des irrégularités ? De la poudre aux yeux ? Ce qui confirmerait le jusqu’au-boutisme de la CENI, selon un schéma préétabli.
Gestion de temps ? Argument plausible mais négociable. La CENI y gagnerait beaucoup en confiance et en crédibilité en retardant la publication des législatives prévue le 13 janvier 2012 de quelques jours. Elle l‘a fait avec la présidentielle. Pourquoi pas avec les législatives ?
Souveraineté nationale ? Beau prétexte mais simpliste comme subterfuge. Sinon, la CENI ne se serait pas permise de faire des appels du pied pour sortir du bourbier où ses services l’ont enfoncée.
En fait, le problème fondamental demeure la crédibilité du scrutin au niveau législatif avec effet d’entraînement positif sur la présidentielle, et au-delà, tout le processus électoral, maintenant, dans les jours et mois à venir lors de prochaines échéances électorales.
Il est donc important que l’on retienne que la CENi est une institution d’appui à la démocratie et dépersonnalisée. Son existence -même si sa mise en place a été douloureuse et porteuse de germes de l’insatisfaction, de l’alignement- n’est pas liée exclusivement aux «élections 2011 » pour fabriquer une «quelconque majorité parlementaire». Ce serait mépriser les institutions nationales, à savoir le président de la République, l’Assemblée nationale, le Sénat, le gouvernement, les Cours et tribunaux, les assemblées provinciales, les gouvernements provinciaux.
Alors, halte à la confusion. Attention à l’opprobre.
Par Le Potentiel
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